Fondé il y a un an et demi, Libéro propose des formations destinées aux éducateurs afin de les aider à comprendre la psychologie et à tirer le meilleur de leurs jeunes joueurs. Pour Le Mag de l’Éducateur, Pascal Stefani, l’un des deux cofondateurs avec Frédéric Hamelin (son compère depuis l’époque de l’excellent média Foot Citoyen, créé par le regretté Didier Roustan), a eu la gentillesse de répondre à nos questions.
Bonjour Pascal, peux-tu nous présenter brièvement ton parcours de joueur dans le football ?
J’ai commencé le football à l’âge de six ans dans mon club de village en Normandie. C’est très important de le préciser, car cette expérience a conditionné beaucoup de choses pour la suite de ma vie dans le football. L’entraîneur des poussins, qui était également président du club à l’époque, passait son temps à crier sur les joueurs. Je me souviens que je finissais les matchs en pleurs. Plus tard, entre mes 16 et 18 ans, j’ai évolué dans un club de niveau R3.
Après presque vingt ans passés à Foot Citoyen, tu décides de co-créer Libéro. Peut-on dire que c’est une suite logique ?
Complètement ! Foot Citoyen a cessé ses activités en 2018 à cause de problèmes financiers. Il était évident que nous voulions tous continuer à être utiles aux gens. Lorsqu’on est dans l’associatif, on a tendance à croire que tout le monde va naturellement nous soutenir financièrement, simplement parce que ce qu’on fait est bien. Mais ce n’est pas le cas. Nous avons tiré des leçons de nos erreurs pour assurer une meilleure pérennité financière avec Libéro.
À Libéro, l’aspect éducatif est au centre du jeu. Pourquoi ?
Il est totalement central, car nous avons constaté que les coachs se préoccupent davantage du résultat sportif que de l’aspect humain. On ne se soucie pas de savoir si les jeunes sont épanouis ou s’ils prennent du plaisir. À Libéro, ce qui nous intéresse, c’est de savoir si le jeune se sent bien. L’essentiel est de passer un bon moment.
Que viennent chercher les éducateurs en se formant chez vous ?
Nous avons remarqué que ce qui intéresse les éducateurs, c’est de mieux comprendre leurs joueurs. Ils s’investissent énormément, mais rencontrent souvent des difficultés pour saisir les motivations de leurs jeunes. Par exemple, nous abordons des notions comme les causes de démotivation des joueurs et nous aidons les éducateurs à y répondre de manière naturelle.
Quels sont les retours des éducateurs post-formation ? Leurs équipes obtiennent-elles de meilleurs résultats ?
Les éducateurs remarquent un vrai changement. Leurs joueurs évoluent de manière plus libérée, mais surtout, c’est le bien-être global des joueurs et des éducateurs qui est spectaculaire. Ils nous disent qu’il y a beaucoup moins de tensions et plus d’envie. La pression exercée par le coach disparaît progressivement. Ce qui est intéressant, c’est que cela a aussi un impact sur les parents : lorsque le coach met moins de pression, les parents suivent cet état d’esprit.
Comment expliques-tu qu’il y ait si peu d’organismes de formation dans le football s’intéressant à l’aspect mental et au bien-être des joueurs ?
Il existe des préparateurs mentaux, mais ils se concentrent souvent sur la performance. Ce que je trouve dommage, c’est qu’en France, on a beaucoup d’outils pour améliorer les performances, mais peu sont axés sur la gestion humaine. C’est lié à une culture du résultat où seul ce dernier compte.
Avez-vous été approchés par la FFF pour une collaboration future ? Pensez-vous travailler avec des clubs professionnels ?
La fédération propose des formations aux entraîneurs, mais la gestion humaine n’est pas prioritaire. Nous avons quelques contacts avec la Ligue d’Occitanie, l’idée étant d’agir en complément. Dans le monde professionnel, nous sommes en relation avec un club de Ligue 1. Cependant, notre objectif principal reste de toucher les dirigeants bénévoles et le monde amateur.
Que peut-on souhaiter à Libéro pour la suite ?
Toucher le plus de gens possible. Nous utilisons le sport comme levier éducatif, et cela m’a aidé dans tous les domaines de ma vie. Les éducateurs nous disent souvent que nos formations les aident également à mieux comprendre leurs propres enfants. Il est essentiel de continuer à travailler sur la relation éducative.
Réalisé par Ousmane Mbaye