Nous restons avec les entraineurs des gardiens dans cette nouvelle interview, cap sur le centre de formation féminin du Paris Saint-Germain, avec Maxime Lenormand qui nous ouvre les portes dans son tout nouveau club.
Bonjour Maxime, peux-tu te présenter à nos lecteurs ?
Maxime Lenormand, 27 ans, entraîneur des gardiennes au centre de formation féminin du Paris Saint-Germain. Je suis également commissaire technique au sein du District du Val-de-Marne, en charge de la détection et sélection des gardiens du département.
Je fais partie de l’association L’Ekeep, fondée par Rudy JEANNE-ROSE (entraîneur des gardiens U19 au CDF du Paris SG) et parrainée par Mickaël BOULLY (entraîneur des gardiens au Paris FC) qui a pour but de regrouper différents entraîneurs de gardiens autour d’une méthodologie commune ayant pour objectif de mettre le geste technique au service de l’action de jeu.
Quel a été le parcours qui t’a mené jusqu’au Paris Saint-Germain ?
J’ai arrêté ma carrière de gardien assez jeune en 2020, j’étais à ce moment au CO Vincennes. À partir de là, je me suis consacré à l’entraînement des jeunes gardiens de but du club en commençant par l’école de football. À force de recherches et de rencontres, j’ai fait évoluer ma méthodologie de travail et cela m’a mené au Paris Université Club pendant une année sur toutes les catégories, puis à l’Union sportive Lusitanos de Saint-Maur en National 3 et enfin le CDF féminin du Paris Saint-Germain depuis cet été.
Peux-tu nous parler de ta manière de travailler et de ta philosophie d’entraînement ?
Si je devais la résumer de manière brève, ma philosophie est de calquer le plus possible l’entraînement spécifique gardien sur la réalité du match. J’entends par là travailler techniquement dans les repères de jeu, confronter les gardiennes à des situations de match pour habituer le cerveau à ce qu’il vivra le week-end et définir des référents cognitifs aux gardiennes pour qu’elles répondent efficacement aux différentes situations de match. Nous travaillons également sur les plans physique, mental et cognitif en s’appuyant sur les experts que nous avons au Paris Saint-Germain.
Qu’est-ce qui te motive dans le développement des gardiennes de but, aussi bien technique que mental ?
Ce qui me motive, c’est de les aider à trouver les clés pour répondre aux différents problèmes qui leur sont posés en match. C’est un travail super intéressant qui demande beaucoup de réflexions, d’analyses et où les réponses à apporter ne sont pas toujours les mêmes en fonction des profils des gardiennes. Il faut parfois se creuser la tête au-delà du football et explorer de nouveaux domaines.
Chaque gardienne étant différente, comment tu t’adaptes à chacune pour exploiter leur potentiel ?
C’est important d’effectuer un travail individuel et adapté à chacune. Pour cela, je me base sur les ressentis terrain et les différents tests effectués en début de saison. Par exemple, pour le développement physique des gardiennes, elles ont une séance de musculation générale avec le groupe, une séance de travail intégré sur le terrain en spécifique et l’idée est de mettre en place en plus, avec l’appui du préparateur physique, une séance plus spécifique en fonction des besoins individuels.
Un des facteurs difficiles à gérer durant un match est le stress, peux-tu nous partager ta vision et des techniques que tu confies à tes joueuses ?
C’est un travail collectif en lien avec le préparateur mental, chacun a un rôle bien défini. Le préparateur mental va essayer de travailler avec la gardienne par le biais de différents outils et techniques, comme l’imagerie mentale, le travail respiratoire ou l’orientation et la compréhension du stress. Pour ma part, j’ai un rôle à jouer sur le terrain en orientant ma pédagogie de façon à dédramatiser les erreurs, contextualiser un maximum les séances pour s’approcher du contexte du week-end et ainsi “désacraliser” le côté match.
Le poste de gardien de but prend une place de plus en plus importante dans le cœur du jeu, comment le staff technique et toi intégrez les gardiennes dans la tactique ?
L’idée est de calquer l’entraînement spécifique sur la programmation de l’entraînement collectif. Par exemple, quand les joueuses évoluent avec l’entraîneur principal sur le principe de jeu conserver / progresser, en spécifique, nous allons développer le jeu au pied et les relances. Globalement, l’idée est de travailler ensemble et non chacun de son côté. Je ne range pas le matériel à la fin du spécifique, mais je reste auprès de mes gardiennes pour les conseiller dans le jeu collectif. J’aimerais également mettre en place des spécifiques gardiennes / attaquantes et gardiennes / défenseuses en petits groupes pour développer les automatismes.
On dit qu’une gardienne qui communique est une gardienne qui rassure, comment abordes-tu cet aspect avec tes joueuses ?
Concernant la communication, je pense que c’est un des aspects fondamental du poste, au même titre que la tactique, la technique, le physique, etc. Nous le travaillons en spécifique avec l’idée de définir la manière de communiquer : Pourquoi communiquer ? Quand communiquer ? Que communiquer ? Afin d’être efficace pour le groupe. Dans une seconde phase, je pense qu’il faut élaborer un lexique collectif de la communication, pour que tout le monde comprenne les consignes. Au même titre que la capitaine, la gardienne doit être un relais du coach sur le terrain.
Quel est selon toi l’aspect le plus difficile à maîtriser pour les gardiennes de football au haut niveau ?
Je ne vais pas être très original, mais il y a une différence marquante avec les gardiens sur la taille. On a des buts identiques aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Quand on voit les critères de sélection chez les hommes, il n’y a presque plus un gardien sous le mètre quatre-vingt-dix, en tout cas c’est la moyenne dans les plus grands championnats Européens. Chez les féminines, on tourne plutôt autour du mètre soixante-quinze avec en plus des qualités d’explosivité qui souvent sont moindres. Forcément, c’est la grosse difficulté aujourd’hui, ça demande d’être encore plus juste sur le plan tactique et puis de définir des stratégies pour être le plus efficace possible.
Tu découvres cette saison un haut niveau au sein d’une grande structure, quels sont tes principaux défis ?
Ce qui change pour moi, c’est surtout la structure, avec des installations de haut niveau, des exigences en adéquation avec les infrastructures, un staff beaucoup plus étoffé avec des experts dans chaque domaine de la performance. Néanmoins, sur le terrain, les défis restent les mêmes avec la mise en place de la méthodologie pour amener les gardiennes jusqu’à leur objectif de passer professionnelles au sein du Paris Saint-Germain.
Quels sont les objectifs qui ont été fixés avec les joueuses ou à titre personnel ?
Les objectifs à moyen/long terme ce sont les gardiennes qui se les fixent, ça peut être de jouer en U19 Nationaux, signer son premier contrat professionnel, etc. Pour ma part, je me dois de leur donner les moyens pour les atteindre. Il peut m’arriver effectivement de fixer des objectifs spécifiques, par exemple, sur les sorties aériennes si ma gardienne a tendance à ne pas jouer le coup à fond, je vais lui demander, quitte à se trouver une ou deux fois, de tendre les bras au maximum et d’être plus offensive sur sa prise de balle.
Nous arrivons à la fin de l’interview et je souhaiterais savoir quel est ton moment marquant dans ta carrière d’entraîneur des gardiens ?
Je parlerai surtout de ma rencontre avec Rudy JEANNE-ROSE, quelqu’un que je connais depuis maintenant trois ans. Il a révolutionné mon approche méthodologique et enclenché une vraie réflexion sur mon travail. Il a accepté de s’ouvrir et de partager ses connaissances et c’est pour cela que j’ai un grand respect pour lui. Je lui dois beaucoup, ainsi qu’à l’association l’Ekeep et tous ses membres.
Interview réalisé par Franck Marty-Noël
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